Se faire un nom

Comprenant que le combat se terminait, Kaagu se précipita face au vaisseau contrebandier. Drez, lui, à moitié sonné, faisait mettre face contre terre le négociateur, et les hommes de main se précipitaient en bas, prenant position à la manière de pseudo soldats aux allures dégingandées.
Laissant de côté les détails, il montra son arme aux contrebandiers placés au poste de pilotage. Il la laissa tomber à terre et leva les mains, faisant des signes pour leur demander de s'arrêter. Il cria aussi aux hommes de main de ne pas pointer leurs armes n'importe où, aussi se contentèrent-ils de tenir le négociateur en joue.

Comme ça allait, Kaagu avait soit beaucoup de chance soit beaucoup de talent ; peut-être un peu des deux. Il aurait préféré s'en sortir sans blessé grave ; lui-même avait été blessé, d'ailleurs. Mais sa vengeance ne pouvait souffrir aucun repos. Il lui fallait prendre le contrôle des Rats s'il voulait prendre le contrôle des rues.

Kaagu savait que l'Alliance Galactique avait connu une guerre civile meurtrière. Il ne s'attendait pas, néanmoins, à ce que des Bothans se mettent à négocier ouvertement avec des criminels de seconde zone condamnés par Falleen et par l'Alliance. Il se disait néanmoins qu'il ne connaissait pas vraiment cette espèce, comme aucune autre. Lui avait grandi avec la propagande falleen, qui voulait que les Falleen soient des être supérieurs en toute chose.
Il allait falloir qu'il oublie la propagande pour réfléchir avec clarté. Les Bothans, à ce qu'ils paraient, étaient sournois, vénaux et pervers. Kaagu se dit que si la noblesse l'avait dit, c'est qu'ils devaient être ingénieux et prompts à faire des affaires louches pour s'enrichir. Le Bothan devait donc être quelqu'un qui savait ce qu'il faisait. Il ne serait sûrement pas à la tête du trio sinon.

Kaagu Latha - Je ne vais pas vous raconter de salades.

Il s'approcha du Bothan, grimpant sur la rampe du vaisseau. Le négociateur ne broncha pas, il était confiant. Il devait avoir deviné ce qui se tramait.

Kaagu Latha - Je suis le nouveau champion du bras droit de Borgom. On a prévu de prendre le contrôle du gang. Pour ça, on doit commencer par leur couper les vivres. Or, on n'a aucune envie de couper le commerce. Tout ce qu'on vous demande, c'est de bosser avec nous. Vous pouvez rester neutres, on s'en fiche. On placera des hommes à l'entrepôt dans les jours qui viennent, et les transferts seront sûrs.

Kaagu considéra avec un peu d'amertume le Bothan qui venait d'accroître très significativement ses marges. Il devait bien se douter qu'une guerre amènerait une hausse des prix. Cela prendrait des années pour ramener les coûts à la normale. Et ça ne faisait que commencer. Le hangar servait sûrement pour de nombreux trafics, mais les négociateurs de Ronor risquaient de devoir mener des négociations avec chaque contrebandier, qui, chacun à son tour, essaierait de ramener les prix le plus haut possible.

Il y eut une poignée de mains, puis Kaagu descendit. Il prévint le chef du commando, qui s'empressa d'aller à une console pour activer des droïdes ouvriers. Ceux-ci commencèrent à décharger la cargaison, et il alla payer le Bothan. Le vaisseau était à l'arrêt complet à présent.

Kaagu se dirigea vers les corps des deux hommes de main. Il les fouilla et récupéra ce qu'il pouvait tout en observant du coin de l'oeil Drez, qui avait beaucoup donné lors de son pugilat. Le négociateur était plutôt doué ; plus que prévu.

Kaagu Latha - Tu t'es bien battu, Drez. Tu n'y étais même pas obligé. Je te dois de relâcher ma méfiance envers toi.

Kaagu était déçu et inquiet de l'élan d'agressivité de Drez. Il lui aurait volontiers offert un des fusils qu'il avait ramassé, mais il décida de se raviser. Il ne voulait pas mourir d'une balle dans le dos, et commençait à envisager l'idée de se débarrasser de son guide. Simplement, bien qu'il ne soit pas du genre à faire des sentiments, il rechignait à cette idée. Il avait assez besoin de Drez pour tolérer un écart pareil. Bientôt, il n'aurait peut-être plus besoin de lui.

Finalement, se dirigeant vers le négociateur, bien immobilisé à présent, il le considéra un moment. Il avait peu de chances de le faire parler. Il envisagea un moment de l'envoyer directement à Ronor, mais choisit de tenter sa chance.

Kaagu Latha - Laissez-le moi un instant.

Il fit signe aux hommes de main présents pour le surveiller. Ils se regardèrent haussèrent les épaules, se séparèrent. Après tout, s'il désirait s'en charger un peu avant l'expédition, il le pouvait bien.
Kaagu s'empara d'une caisse présente tout prêt. Il prit son pistolet à la main et commença à le triturer, tout en s'asseyant face au négociateur.

Kaagu Latha - C'est quoi ton nom, l'affreux ? Tu ferais mieux de répondre à mes questions, c'est clair ?

Kaagu écouta le négociateur qui se débinait. Il se moquait pas mal de savoir s'il avait des enfants ou des justifications. Pour la peine, il était en position de faiblesse et n'aurait pas de traitement de faveur. Kaagu avait appris, à ses dépends, que non seulement on n'était bien servi que par soi-même, mais qu'en plus on devait faire comprendre aux autres qui était le chef. Il ne lui accorda aucun regard condescendant et lui fit comprendre quelle était la situation en lui mettant une claque une fois ses pleurnicheries terminées.

Kaagu Latha - Dis-moi plutôt, Vorg, ce que tu sais des activités de Borgom ; les points faibles, les coûts, les horaires, la nature des marchandises, les intermédiaires et les partenaires : je veux tout savoir.

Il ne s'attendait pas à être tombé sur une mine d'informations, mais il préférait ratisser large, se gaver d'infos d'intérêt avant de reprendre son combat. Plus que cela : il envisageait peut-être d'avoir Ronor à son propre jeu. Le Prince des égouts, ce ponte parmi les Rats, était intelligent, mais faible. Kaagu doutait qu'il soit vraiment un stratège en matière de guerre ; sinon quoi, pourquoi aurait-il choisi de prendre un petit chef comme lui sous son aile ?

Kaagu ne se faisait pas d'illusions : il n'était pas à la hauteur pour affronter Borgom face à face. Il devrait faire preuve d'intelligence. Celle de Ronor faisait office de remplacement pour le moment, mais il faudrait qu'il inverse les rôles à un moment ou un autre. Plus il en saurait sur Borgom et Ronor, plus il aurait de chances de réussir. Une idée lui vint.

Kaagu Latha - Et parle-moi aussi de Ronor, tant que t'y es. Dis-moi tout ce que tu sais.

/hrp/ De retour ! /hrp/


Le Falleen encaissa les nouvelles sans laisser paraître son embêtement. Si ce que disait le négociateur était vrai, alors Ronor avait déjà perdu ; ce n'était qu'une question de temps avant que cela devienne officiel. Borgom avait aussi pu diffuser une intox pour convaincre les partisans de Ronor de déserter, mais c'était peu probable. Si c'était bien un chef assez agressif, Borgom jouerait franc jeu, comme beaucoup de caïds assez chiches et certains de leur supériorité. Il fallait qu'il se sorte de là, qu'il tire parti de cette révélation pour se faire son indépendance et défaire les deux chefs d'un coup.

Son problème, c'était qu'il manquait de moyen. Mais peut-être l'équipe d'assaut saurait-elle rallier plus d'hommes à sa cause lorsqu'elle saurait que Ronor était perdu ? Avec une équipe comme celle-ci et des renforts, il pourrait tenir les deux entrepôts et entamer une vraie guerre d'usure contre Borgom et, au pire des cas, Ronor également.

Lorsque les fonds commenceraient à manquer, les hommes de Borgom se rallieraient en masse, s'ils ne le faisaient pas après un échec en voyant leurs perspectives d'avenir s'amoindrir. Il n'y avait pas plus bancale qu'un chef qui se reposait sur la force.

Kaagu Latha - Tu vas répéter ça aux gars que je vais faire venir. Si tu jures de me servir ensuite, tu seras épargné.

Kaagu s'exécuta. Laissant le négociateur seul un instant, il appela les hommes de main et Drez, les réunissant pour leur faire entendre les informations et leur proposer son plan.

Le Falleen savait bien qu'on ne le suivrait pas sur parole, qu'il faudrait qu'il montre qu'il avait assez d'audace pour mener son plan à bien. Le chef du commando avait bien compris la situation. Il était assez critique, mais semblait plus indécis qu'hostile. Savoir que son patron allait échouer devait lui avoir mis un sacré coup au moral. Il semblait avoir voulu y croire. Ce coup déterminant qu'il avait porté lui aurait sûrement promis de belles perspectives d'évolution. Kaagu décida qu'il devrait se montrer séducteur et magnanime. Mais avant tout, il devait croire, ou donner l'impression de croire, à tout ce qu'il disait.

Kaagu Latha - Je comprends ton malaise. Dis-moi ton nom, et, quand nous aurons mis au jour le complot et réglé la question, tu auras une place de choix dans le cercle des dirigeants des Rats. Crois-moi, Ronor est peut-être déjà mort, ou bien la taupe attend que tu reviennes avec des nouvelles pour exécuter la mise à mort. Nous pouvons le démasquer et récupérer ceux qui, parmi les Rats, aspirent à renverser Borgom pour de bon.

Le chef du commando ne pouvait faire marche arrière, il savait qu'il allait devoir prendre une décision, et que Kaagu constituait sa meilleure chance, à ce stade, de survivre et de s'en sortir avec de bons résultats.

Kaagu Latha - Nous n'avons guère le temps. Nous devons aller vite. Il faut que toi et moi fassions notre rapport à Ronor. Nous tuerons la taupe et prendrons le contrôle des opérations. On sécurisera ce hangar pour de bon, et on prendra le hangar secret non loin d'ici avec une véritable équipe d'assaut. Le temps qu'ils réalisent, les hommes de Borgom auront déjà perdu.

Kaagu avait atteint le point de rendez-vous dans un état de stress contenu. Il savait que, si Vorg avait dit vrai, ils seraient confrontés à une situation de crise dès que les choses seraient engagées. Afin d'assurer la sécurité du hangar récemment conquis, Kaagu avait laissé un de ses fusils à Drez. Il était maintenant prêt à affronter son propre destin.
Lorsque le trio arriva devant Ronor, le personnage les accueillit comme si sa victoire était annoncée. Kaagu, Vorg et Oren, eux, savaient que ses instants étaient probablement comptés. La scène était surréaliste, Ronor se pavanant tandis que son commando, son associé et son prisonnier cherchaient à deviner l'identité de l'agresseur potentiel. La taupe, le traître, n'hésiterait sûrement pas une seule seconde en apprenant que la guerre était lancée. Les hommes de Borgom auraient besoin de déstabiliser leurs ennemis avant d'attaquer, pour arracher une victoire facile. C'était maintenant que Ronor serait tué, et la contre-attaque, en cas d'assassinat, ne tarderait pas.
Kaagu avait besoin de plus de temps et d'un acte favorable. Il savait qu'il aurait besoin du soutien de la Force dans cette épreuve, et sa détermination sembla effectivement agir sur le cours des évènements.

Kaagu Latha - Voici un négociateur pris en train de marchander avec des contrebandiers dans le hangar. Ses gardes ont été éliminés et les contrebandiers nous connaissent désormais. Il y a autre chose : cet homme affirme que Borgom dispose d'un hangar secret en bordure du District, à sept kilomètres au nord du hangar que nous avons pris. Nous allons avoir besoin d'une petite troupe pour prendre et sécuriser cet endroit. Une autre troupe peut d'ores et déjà relever la nôtre. Notre mission est accomplie.

Si ça devait arriver, c'était maintenant. Kaagu se tendit, tentant de cacher son malaise, et se laissa porter par son instinct.

Utilisation d'un Holocron pour influer sur le récit.

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Kaagu avait senti son sang chauffer. Sa peau était devenue plus sombre, mais il s'était courageusement contrôlé, et avait fait forte impression. Maintenant qu'il se remettait de ses émotions et qu'il se montrait de nouveau en état de réfléchir, il savourait l'instant. Par chance, la garde du corps avait cru celui qui avait vu toute la scène. Ils étaient tous déboussolés et prêts à prêter allégeance à un nouveau chef. En temps normal, ils auraient sans doute immédiatement rendu les armes à Borgom ; mais Kaagu était par là. Il lui serait facile de remplacer le vide en jouant sur le désir de vengeance. Avec toute la garde rapprochée dans sa poche, il aurait sûrement avec lui tous les partisans de Ronor ; ce qui devait constituer au moins la moitié du gang. Ronor ne se serait pas lancé sans l'avantage du nombre, qui faisait souvent la différence, dans les guerres de gangs, où les chefs de file étaient rarement astucieux et plus portés sur les fusillades opportunistes. La guerre allait coûter cher aux Rats ; sauf si Kaagu était capable d'y mettre un terme en éliminant Borgom. Il devait absolument présenter son plan pour prendre le pouvoir. Le chef n'était certainement pas au courant de la situation, avec sa taupe démasquée. Oren et Vorg le soutiendraient certainement ; Vorg lui devait la vie, et Oren l'avait vu à l'oeuvre au hangar. Il savait qu'il avait l'étoffe d'un chef, pas d'un simple chef de file.

Kaagu Latha - Hommes de Ronor, écoutez-moi ! Votre chef était un homme rusé, mais il était trop confiant, et il a été vaincu par un caïd plus astucieux qu'il le pensait. Mais ce caïd a raté son coup ! Il ne sait rien de ce qui se passe ici. Il est aveugle et sourd, et nous devons en profiter. Les plans de Ronor sont lancés. N'abandonnez pas ! Tous ces efforts n'ont pas été consentis en vain. Soutenez-moi et portez-moi comme votre chef, et je tuerai Borgom de mes mains, avec vous, dans une guerre éclair qui choquera jusqu'aux puissants de cette planète !

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